La place de la femme dans l’e-sport : Un combat qui ne fait que commencer
La Ligue Féminine, la Women’s Esports League, Tournoi CS:GO féminin des World Electronic Sports Games ; une chose est sûre, l’e-sport pour les joueuses est en constante progression. Mais une question reste en suspens, pourquoi est-on si loin de la mixité dans les compétitions de jeux vidéos ?
Sport et e-sport : Un parallèle plausible dans la quête de la mixité ?
Le sport, une activité qui existe depuis des millénaires, se heurte pourtant aux mêmes problèmes que le monde de l’e-sport. La mixité dans le sport, à l’échelle des compétitions internationales, est très rare, on la retrouve dans certains d’entre-eux, l’équitation notamment, le curling ou encore le patinage artistique. Là où les capacités physiques du corps humain entrent en jeu dans le sport, il semblerait que dans les compétitions de jeux vidéos ce facteur limitant la mixité n’existe pas. Gilles Vieille Marchiset, écrivain dans le domaine du sport, nous rappelle d’ailleurs que la mixité serait aussi possible dans ce secteur “[S’il y a] une vraie demande sociale pour plus de mixité, elle vient se heurter à la logique des records et du business” mais que le marketing et les droits TV sont intéressés par ce qui fait vendre ; les records à la pelle.
Mais alors pourquoi l’e-sport ne pourrait-il pas être le théâtre d’une mixité quasi parfaite ?
L’e-sport est une exception, à l’image des Échecs ou encore du Poker, cette discipline peut rentrer dans la catégorie des sports “cérébraux” qui, comme leur nom l’indique, se basent quasi intégralement sur les aptitudes psychologiques des participants. Il est d’ailleurs assez commun de voir des joueuses d’Échecs et de Poker assises face à des hommes dans les compétitions, les tournois internationaux. Certaines en font même leur métier.
Historiquement, le jeu vidéo (tout comme les deux autres exemples cités ci-dessus) est plutôt une discipline conjuguée au masculin. Début des années 90, le marketing, dans le domaine du jeu vidéo, est très orienté sur une cible masculine. De la Game Boy Advance en passant par les Xbox, les Playstation ou même les jeux PC, la communication, la publicité se font principalement sur les jeunes garçons.
Ainsi la conséquence est logique ; les premières compétitions d’e-sport au début des années 2000 sont un désert de jeunes filles tout comme les premières LAN (Local Area Network). Cependant, petit à petit, avec l’évolution du jeu vidéo, de nouvelles licences sortent, les visions changent, et les femmes font une entrée remarquée dans ce domaine. Quelques joueuses professionnelles gravissent les échelons, notamment avec le FPS (First Personal Shooter) phare, CS:GO. Si bien qu’aujourd’hui la parité dans les joueurs n’a probablement jamais été aussi proche, selon une étude dont les résultats se basent sur l’année 2012, 47% des joueurs en France sont des joueuses, tout comme aux USA, on dépasse même la parité avec 66% de joueuses au Japon.
Les femmes jouent mais nous n’en comptons aucune dans les grandes compétitions d’e-sport que peuvent-être les LEC, les LCS ou encore la LCK sur League of Legends, alors, existe-t-il une autre barrière ?
League of Legends est sûrement LE jeu e-sport par excellence ; des compétitions dans des stades de foot, des centaines de milliers de spectateurs sur Twitch (plateforme de streaming) lors de grandes rencontres internationales et pourtant un constat simple et clair, aucune participante dans l’histoire des championnats du monde. Si je vous dis e-sport vous pensez sûrement très vite à League of Legends, Overwatch, Fortnite, Rocket League, CS:GO ou que sais-je encore, la réalité est que la parité ne semble pas forcément exister sur ces jeux e-sport. C’est un fait, une joueuse de jeu vidéo n’est pas forcément une joueuse de “hardcore game”, il semblerait également qu’elle soit plus versatile, une gameuse joue en moyenne à plus de jeux différents que les gamers. Une conséquence directe de cela est l’investissement sur ce dit jeu. Nous retrouvons donc dans les meilleurs joueurs moins de femmes que d’hommes car elles sont moins nombreuses et en moyenne moins investies sur un seul et même jeu, oui mais, cela n’explique toujours pas l’absence totale de filles aux grandes compétitions de League of Legends.
On peut se rappeler des Gaming House florissantes dans les années 2012 / 2013 avec des joueurs et même un staff très jeune. Il était très dûr pour une fille, même à compétence égale, de se retrouver autour de 4 hommes, dans une équipe de 5, et d’un coaching staff intégralement masculin. Il est facile, et malheureux, d’imaginer les potentielles dérives que peuvent amener la cohabitation 6 jours sur 7 de 8 à 9 hommes avec une seule femme.
On peut l’imaginer et on peut même le constater, plusieurs affaires sont ressorties de certaines de ces “tentatives”. Mais une partie d’entre elles s’en sont sorties, malgré cela beaucoup se sont heurtées à d’autres problèmes, prenons l’exemple de Kim Shee-Yoon, “connue sous le pseudo d’Eve” victime d’insultes des fans de l’équipe dont elle faisait partie, elle ira même jusqu’à clore son compte twitter suite à des harcèlements sexuels contre elle.
La médiatisation des joueurs aussi est quelque chose qui évolue et encore une fois pour les femmes cela reste compliqué, en effet, la plateforme Twitch est beaucoup utilisée par les gamers mais quand il s’agit d’une fille…
Pêle-mêle ci-dessus vous retrouvez des remarques fréquentes sur les femmes qui jouent à haut niveau (ici pour Marie-Laure “Kayane” Norindr).
Et quand ce ne sont pas des remarques sexistes nous retrouvons assez fréquemment des remarques sur leurs qualités physiques et non techniques ou stratégiques comme cela pourrait être la plupart du temps le cas avec un joueur professionnel masculin.
Pour toutes ces raisons là, il semble compliqué, même en 2019, pour une fille de grimper les échelons et de parvenir à son but, devenir une joueuse professionnelle à part entière ; c’est pourquoi des compétitions uniquement réservées aux femmes sont en recrudescence comme La Ligue Féminine ou bien la Women’s Esports League sur League of Legends. Un bon point pour faire toucher du doigt le monde professionnel et médiatique de l’esport pour les femmes et surtout leur permettre de se lancer dans une équipe avec des joueuses qui, peut-être, ont pu avoir le même parcours qu’elles. Faudra-t-il maintenir ce genre de tournoi ou bien faire la transition pour les joueuses vers des tournois mixtes ? Une question à laquelle le temps nous permettra sûrement de trouver une réponse.
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